mercredi 13 mars 2013

Une question de justice


Une question de justice


Le président vénézuélien Hugo Chavez, mort mardi, a véritablement marqué son époque, comme en témoignent les réactions suscitées par sa disparition. On n’y décèle pas la moindre forme d’indifférence. Des gouvernements parlent d’une certaine manière d’héritage à préserver, tandis que d’autres n’hésitent pas à considérer que cette disparition est la fin d’une époque ou, plus simplement, la souhaiter. Que fait-on alors des opinions qui pourraient maintenir le projet, mais sans son auteur, le pays devant élire un successeur dans les prochaines semaines ? La réaction des Etats-Unis était attendue, puisque les relations entre les deux pays, sans être en crise, étaient quelque peu tumultueuses, même si le Venezuela n’a jamais cessé ses livraisons de pétrole aux USA.
C’est pourquoi le président Barack Obama considère que «le Venezuela entame un nouveau chapitre de son histoire» tout en souhaitant établir avec lui «des relations constructives». C’est la même approche développée par l’Allemagne qui souhaite «un nouveau départ» et que le Venezuela entame une nouvelle ère. Pourtant l’Europe, à travers ses institutions, développe un tout autre point de vue, considérant même que Hugo Chavez a laissé un héritage, «le développement social» qu’il avait mis en œuvre dans son pays.
C’est un hommage en règle qui lui est rendu. «Le Venezuela s’est distingué par son développement social et par sa contribution à l’intégration régionale de l’Amérique du Sud», ont noté les deux plus hauts responsables européens, qui ont émis le souhait de pouvoir «approfondir à l’avenir les relations» entre Caracas et l’UE.
Pas la moindre surprise à travers pratiquement l’ensemble du sous-continent sud-américain, longtemps marqué par les coups d’Etat, les dictatures et le sous-développement. Hugo Chavez avait réussi le sien, mais ses scores électoraux et sa réussite parlaient pour lui jusque dans la région, qui a véritablement vécu son printemps avec de nombreux leaders qui se sont montrés plus près de leurs peuples, provoquant d’ailleurs une espèce de révolution suscitant la peur de ceux qui refusaient que l’ordre, qu’ils avaient eux-mêmes mis en place, soit remis en cause. La présidente du Brésil n’a alors pas manqué de dire de lui qu’il était «un grand Sud-Américain qui a lutté pour un monde plus juste» et dont la perte est «irréparable», comme la qualifie aussi le président équatorien. Pour ces derniers ainsi que pour le chef de l’Etat russe, Chavez était tout sauf un personnage du passé, bien au contraire, c’était quelqu’un qui regardait vers l’avenir.
Comme de son vivant, Chavez ne laisse pas indifférent. Bien entendu, cette fois les réactions sont plus mesurées, mais les unes et les autres sont l’expression d’un débat, sinon d’une rude compétition au niveau international, rappelant ce débat vieux en vérité de plus d’un demi-siècle et qui consistait à s’opposer à toutes les formes de domination. Comme cet appel lancé depuis Alger, en 1973, en faveur d’un ordre mondial plus juste. Certains concepts ont peut-être disparu, mais le besoin de justice est plus profond que jamais. Une question de justice, mais aussi de bon sens.
Les milieux d’affaires brésiliens se sont bien félicité de la redistribution des terres pour avoir créé de nouveaux besoins et donnant des moyens à une vingtaine de millions de Brésiliens. Chavez a emprunté cette voie avec son processus de nationalisations, malgré l’hostilité des milieux d’affaires. Est-ce pour cette raison qu’il faisait peur alors même qu’il ne s’agissait plus d’exporter une quelconque révolution ? Tout juste un besoin de justice. Un monde plus juste.
Mohammed Larbi

http://www.elwatan.com/international/une-question-de-justice-07-03-2013-205813_112.php

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